La « finance verte », la « finance durable » ou même la « finance climatique » occupent une place de plus en plus importante dans les discussions actuelles du secteur financier à l’échelle mondiale. Pourtant, il n’existe que peu de taxonomies unifiées qui nous permettent d’appréhender l’idée de manière globale et de fournir une base partagée et acceptée pour une exploration plus approfondie. Les méthodologies de gestion des risques climatiques sont émergentes, mais pas encore généralisées.
Mais le paysage de la finance climatique évolue à une vitesse sans précédent et promet donc de déployer son potentiel de transformation. La crise actuelle de Covid-19 n’est pas la seule à avoir mis en évidence la nécessité d’un changement de paradigme en faveur d’une comptabilité et d’un reporting à triple bilan pour comprendre l’impact de l’humanité sur les écosystèmes et le climat afin de le protéger tout en améliorant notre niveau de vie. Les technologies modernes de l’information, de la communication et des données permettent de plonger en profondeur dans un monde d’interrelations complexes entre le climat et les écosystèmes et d’apprendre en permanence comment construire des économies résilientes et à faible émission de carbone. Ce voyage ne fait que commencer.
Qu’est-ce que le financement climatique ?
La CCNUCC définit le financement climatique comme « un financement local, national ou transnational – provenant de sources de financement publiques, privées et alternatives – qui vise à soutenir les mesures d’atténuation et d’adaptation qui permettront de faire face au changement climatique. » L’atténuation du changement climatique vise à diminuer la concentration de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère, soit en réduisant les émissions, soit en augmentant le captage des GES. L’adaptation au changement climatique est constituée de stratégies et d’investissements qui visent à accroître la résilience d’un système (système productif, infrastructures, écosystèmes, etc.), en d’autres termes, la capacité du système à absorber les effets négatifs liés au climat.
Quel est l’état actuel du financement climatique ?
À ce jour, la finance climatique est principalement axée sur le financement de l’atténuation, les grands projets d’énergie éolienne ou solaire, entre autres, étant le moteur des investissements et de leur financement. Selon la Commission mondiale sur l’adaptation et le PNUE, le financement de l’adaptation climatique, qui s’élevait en moyenne à 30 milliards de dollars par an en 2017-18, reste très en deçà des besoins. Le financement mondial devrait être multiplié par dix, pour atteindre 300 milliards de dollars US par an, afin de répondre aux estimations du Programme des Nations unies pour l’environnement sur ce qui est nécessaire pour faire face à l’escalade des risques climatiques.
La répartition entre le financement de l’adaptation et de l’atténuation est de 1:20 (soit 5 % contre 95 %), alors que l’Accord de Paris, le cadre contractuel directeur mondial ratifié en 2015, a établi un objectif de 50 % – 50 %.
En particulier dans les dernières phases de la crise actuelle de Covid-19, la réglementation et les initiatives en matière de financement du climat sont devenues le point central du débat public afin de permettre une reprise économique plus durable et conforme à l’Accord de Paris : L’UE a publié et est en train de ratifier sa Taxonomie européenne sur la finance durable, la Taskforce on Climate-related Financial Disclosure vise à promouvoir « des investissements, des crédits et des assurances mieux informés » et la Maison Blanche vient de publier un décret sur les risques financiers liés au climat annonçant un cadre complet de surveillance des risques liés au changement climatique.
Dans le même temps, les marchés de capitaux montrent parfois même la voie, comme l’illustre la lettre de 2021 adressée aux PDG par Larry Fink, de Blackrock. Enfin, les risques financiers liés au climat se généralisent et les investissements réactifs seront de plus en plus au cœur des préoccupations des analystes financiers. Ils finiront par devenir une catégorie de risque égale dans la gestion intégrée des risques.
Il est donc juste de dire que les marchés financiers mondiaux sont en train de subir une profonde transformation, tant attendue, car les flux financiers privés liés au climat seront nécessaires pour faire face à la crise climatique.
Quels sont les concepts clés ?
Pour réguler et guider le secteur financier, des métriques et des règles seront définies pour permettre aux institutions financières d’intégrer les définitions de la finance climatique au niveau opérationnel. En 2017, la Taskforce on Climate-related Financial Disclosure du Conseil de stabilité financière (FSB) a émis une série de recommandations à l’intention du secteur financier.
D’une part, les flux financiers doivent être catégorisés en fonction de leur potentiel d’atténuation et d’adaptation. D’autre part, les risques financiers liés au climat doivent être mesurés et divulgués afin d’évaluer correctement les actifs et d’identifier rapidement les variations des primes de risque des actifs.
- Taxonomies des flux financiers liés au climat
Ces taxonomies, dont la taxonomie européenne devrait devenir la norme mondiale, aident les investisseurs et les professionnels de la finance à mesurer l’impact climatique d’un investissement ou d’un projet spécifique. En ce qui concerne les investissements liés à l’atténuation, elles mesurent l’empreinte GES et/ou environnementale, tandis que pour les investissements liés à l’adaptation, il s’agit de mesurer l’effet d’un investissement spécifique sur la résilience climatique du système concerné. Il est clair que les investissements d’adaptation sont plus difficiles à évaluer car les données sur les interrelations entre les investissements et leurs effets sur les systèmes de production, par exemple, sont moins disponibles. En outre, l’adaptation est très sensible au contexte local, c’est-à-dire que les solutions doivent correspondre à une réalité très spécifique sur place, qui doit également être évaluée. Néanmoins, diverses taxonomies ont vu le jour au cours des dernières années.
- Informations sur les risques financiers liés au climat
Les risques financiers liés au climat sont divisés en deux domaines principaux : les risques de transition et les risques physiques. Les risques de transition font référence à l’augmentation des risques des entreprises en raison de la demande réglementaire, légale ou du marché qui affecte négativement leur capacité à générer des revenus. Les risques physiques sont liés aux impacts climatiques négatifs, tels que les événements météorologiques ou hydrologiques, qui ont un impact négatif sur les entreprises en menaçant directement la production et les actifs.
Ensemble, la divulgation des flux de financement climatique ainsi que des risques physiques et de transition fournit un panorama complet du financement climatique – le premier abordant le second : l’investissement dans les solutions climatiques aborde directement les augmentations potentielles des primes de risque liées au climat. Dans cette optique, et en tenant compte des risques sociaux, le secteur financier mondial dispose de tous les outils nécessaires à la mise en œuvre d’une comptabilité et d’un reporting à triple bilan.
Le changement de paradigme : Des données qui permettent de plonger en profondeur
Ce n’est qu’avec les récentes technologies numériques de communication et d’information qu’il est réellement possible d’appréhender et de gérer de manière proactive les complexités de la finance climatique d’aujourd’hui : de nombreuses institutions financières pionnières gèrent leurs opérations exclusivement sur des plateformes numériques, qui permettent la combinaison de plusieurs sources de données (par exemple, les dossiers administratifs sur les prêts décaissés combinés avec des cartes de risques climatiques, par exemple ici : YAPU Solutions). Les exigences de la finance climatique moderne peuvent ainsi être traduites en processus opérationnels simplifiés.
Résumé
L’économie mondiale et le secteur financier mondial connaissent de profonds changements, ce dernier étant de plus en plus prêt à assumer son rôle de moteur du changement vers une économie plus résiliente et à faible, voire à zéro, émission de carbone. Des méthodologies et des solutions opérationnelles, essentiellement numériques, sont de plus en plus disponibles et permettent aux autorités de régulation du secteur financier d’introduire des cadres solides. Le changement est profond et façonnera tous les segments des secteurs financiers dans le monde entier. Mais il n’a jamais été aussi facile de relever ce défi, grâce à l’augmentation des offres numériques disponibles sur les marchés pour y faire face. En ce sens, un avenir durable est possible.
par Christoph Jungfleisch, PDG et fondateur de YAPU Solutions
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